Et hop, dans la sauce 🍝

En cuisine, les femmes comptent pour du beurre + carte postale du turfu

JALAPEÑEWS
3 min ⋅ 07/11/2023

CHAUD DEVANT

MAUVAISE TAMBOUILLE ~ Le lundi, c’est ravioli. Pour vous et moi, car d'autres se tapent autrement la cloche. Hier soir, au très chic Pavillon d’Armenonville dans le très chiant XVIe arrondissement de Paris, se tenait le gala annuel du guide culinaire Gault et Millau. Si on n’a pas goûté le contenu des assiettes, probablement délicieux, ce dîner nous laisse un goût amer dans la bouche. Car comme l’a relevé la journaliste et autrice Nora Bouazzouni sur son compte Twitter / X, le thème était plus "autour de la saucisse" que "hachis parité".

 

 

Libération note un petit effort tout de même : parmi les chef.fes aux manettes de la soirée, on comptait deux femmes contre zéro l’an passé – le plat de viande ainsi que le dessert étaient respectivement signés Alessandra Montagne (Nosso) et Naraé Kim (Pur’, du Park Hyatt Vendôme). Mais ce saupoudrage ne saurait masquer la réalité : pour la énième fois, le prix du Cuisinier 2024 a été remis à un homme (Yoann Conte, Maison bleue), le Directeurs de salle de l’année 2024 s’appelle Thierry Pruvot (le Pré Catelan) et le Sommelier de l’année 2024, Jean-Baptiste Klein (la Table d’Olivier Nasti). Quant au futur de la food, il s’écrit principalement au masculin, selon Gault et Millau : seulement deux Grandes de demain primées (le duo Clio Modaffari et Anne Legrand) contre cinq Grands. Certes, Naraé Kim a été nommée Pâtissière de l’année, mais cette note sucrée ne contrebalance pas notre amertume.

On nous répondra que les femmes sont sous-représentées dans le secteur. Certes, et on ne peut pas les inventer pour leur donner des récompenses. Mais le petit monde de la grande cuisine est si clairement misogyne que chaque poste doit s’activer pour contrebalancer l’énorme déséquilibre actuel, en dénonçant les violences sexistes et sexuelles dans les restos, en mettant en avant les cheffes autrement qu’en tant que caution diversité et en bannissant les discours problématiques (Libé relève qu’hier, un des gagnant a salué son épouse “pas là car elle gardait les enfants”). Allez les gars, d’ici l’an prochain, on se remonte les manches, histoire de ne pas finir dans le Gault et Miso.

TAPAS DU JOUR

~ Nétanyahou refuse un cessez-le-feu et revendique le contrôle de Gaza après la guerre. Sur place, combats et bombardements se poursuivent, et l’ONU décrit la zone comme un cimetière pour les enfants”.

~ Olivier Faure a envoyé un courrier à toutes les formations politiques hors RN pour sa marche contre l’antisémitisme, après avoir jugé que peut-être, on aurait pu défiler avec un parti créé par d’anciens collabos.

~ Le prix Goncourt vient d’être remis à Jean-Baptiste Andrea pour Veiller sur elle (L'Iconoclaste), le prix Renaudot, à Ann Scott pour Les Insolents (Calmann-Lévy).

HOT & POP

IA UN PROBLÈME ~ Si le monde merveilleux de la pub nous colle rarement des paillettes dans les yeux (mais plutôt des envies de cogner des gens avec le Codes du travail), on doit reconnaître que la dernière campagne BETC pour Heetch, application française de VTC qui dessert particulièrement les quartiers populaires, est une réussite. Le pitch : quand on ajoute le terme "banlieue" à une requête Midjourney, le célèbre générateur d'images par intelligence artificielle se met à créer des visuels aux allures cauchemardesques : délabrement, saleté, violence...

Dans une vidéo partagée hier sur les réseaux sociaux, BETC et Heetch montrent les réactions choquées de personnes qu’on image issues de la banlieue. La campagne propose ensuite au public d’agir, l’idée étant de fournir "aux employés de Midjourney une base de données corrective de milliers de photos de la banlieue, la vraie, capable de nuancer un peu sa représentation par l’IA", explique Renaud Berthe, patron du marketing de Heetch.

Depuis le 6 novembre, l’entreprise distribue une cinquantaine de carte postales différentes, loin des clichés négatifs sur les quartiers. Au dos, on trouve une adresse pré-remplie pour les envoyer aux onze employé.es de Midjourney, à San Francisco, ainsi qu’un QR code à flasher pour qu'iels puissent accéder à une base de données comprenant des milliers d’images de la banlieue. Ces cartes sont dispos dans des bars, des boulangeries, des kebabs, chez le coiffeur, dans des laveries et bien sûr, dans des véhicules Heetch.

Au-delà du coup de com très malin, cette campagne met en lumière une réalité : l’IA, comme toute nouvelle techno, est farcie de biais racistes, classistes, sexistes… ... Dans un article très complet du site Le monde informatique consacré à l’intelligence artificielle, le spécialiste Olivier Penelle alerte sur ses biais historiques (elle reproduit les inégalités du monde réel) ou encore, ses biais algorithmiques, qui reflètent ceux des personnes qui la développe. Le résultat étant que l'IA risque d'“amplifier les discriminations sociales et économiques inhérentes à nos sociétés”.

Comment y remédier ? Les cartes postales ne suffiront pas : c'est aux entreprises comme MidJourney, ChatGPT, Google Bard de mettre la main au porte-monnaie et d'investir massivement dans la lutte contre les orientations problématiques de leurs outils. On vous enverrait bien un bon baiser du futur, mais il nous fait flipper.

Jalapeñews est une newsletter de Coline Clavaud-Mégevand. DA Chiara Vecchiarelli.

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Par Coline Clavaud-Mégevand

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