L’unité sous conditions + Bella, elle l’a
DES BAS PUBLICS ~ Quand on pense avoir touché le fond, la classe politique française creuse encore. Ce mardi, la présidente Renaissance de l’Assemblée, Yaël Braun-Pivet, et le président Les Républicains du Sénat, Gérard Larcher, ont proposé une grande marche contre l’antisémitisme qui se tiendra dimanche à Paris. L’initiative, qui fait suite à l’explosion des actes antisémites (plus de 1000 depuis le 7 octobre et l'attaque du Hamas en Israël ), n’en finit plus de diviser, malgré un appel qui se voulait clair : il s’agit d’un rassemblent “civique”, pas d’un appel aux partis politiques. Las, ces deniers se sont immédiatement invités, sans que les deux initiateurices ne puissent rien y faire. La faute à leur statut éminemment politique, à un appel à manifester pas franchement irréprochable (le texte insiste curieusement sur le fait que la laïcité “doit être protégée” et reste “un rempart contre l’islamisme”), bref, toute l’opération sent le manque de recul stratégique à plein nez. Le Rassemblement National s’est évidemment engouffré dans la brèche, voyant là une occasion de matraquer son argumentaire anti-immigration / islam et de se prétendre l’allié des Juif.ves de France. Jean-Luc Mélenchon, qui sait qu’il sera accueilli à la marche comme un clébard dans un jeu de quilles (en mars 2018, il avait dû être exfiltré de la marche blanche en mémoire de Mireille Knoll), a également ajouté au chaos, en justifiant son absence par de nouvelles outrances.
Une situation de rêve pour ces commentateurices qui aiment mettre sur le même plan extrême droite et extrême gauche, un cauchemar pour celleux qui attendaient enfin un sursaut de la gauche rassemblée et ne se voient pas défiler aux côtés des fachos.
Bien embarrassé aussi, Emmanuel Macron. Doit-il venir dimanche et se présenter en rempart contre la haine ? Ne risque-t-il pas de se voir rappeler qu’il mène une politique pas si lointaine de celle de l’extrême droite, en se reposant notamment sur un Darmanin pas clair en matière d’antisémitisme ? Sans compter que si la marche n’est pas un succès, son image de président qui peine à rassembler derrière lui s’en trouvera renforcée.
Après cette semaine bordélique, on ne peut que regretter que l’initiative de la marche ne soit pas plutôt venue des corps intermédiaires (associations, syndicats...), ce qui aurait permis de poser des limites claires, en particulier, aux dirigeant.es du RN. On aurait pu aussi imaginer une marche contre l’antisémitisme et tous les racismes, symbole de concorde et de paix.
Seul point positif : interrogé dimanche dernier sur le passif de son parti, Jordan Bardella a tenté un triple lutz pour finalement se ramasser comme une merde. En affirmant que Jean-Marie Le Pen n’était pas antisémite, alors que le cofondateur du FN / RN a littéralement été condamné pour antisémitisme en 1986 et a multiplié tout au long de sa vie les déclarations abjectes, il a permis aux médias et aux internautes de rappeler le vrai visage de sa formation, que ses membres rêvent de faire oublier. Une mince rustine, à l’heure où toutes les digues semblent avoir sauté.
~ Emmanuel Macron appelle clairement à un cessez-le-feu pour la première fois depuis le début de la guerre entre Israël et le Hamas. Il a également annoncé que la France va augmenter son aide humanitaire destinée aux civil.es de Gaza de 20 millions à 100 millions d’euros en 2023.
~ Point vroum-vroum : les SUV électriques, trop gros, risquent de créer des pénuries de métaux critiques, alerte le WWF dans une nouvelle étude. À Bruxelles, les eurodéputé.es ont validé la très light proposition de nouvelle réglementation des émissions automobiles, “une victoire donnée au lobby automobile”, selon Les Écologistes.
~ Que notre joie demeure, roman Canadien Kevin Lambert, décroche le prix Médicis. Une immersion dans le monde des classes dominantes qui va vous donner des envies de manger les riches.
OH BELLA CIAO ~ Bella Hadid n’est pas seulement une superstar du mannequinat, c’est aussi une activiste. Lundi, sur Instagram, la jeune femme a souhaité un bon anniversaire à son père, Mohamed Hadid, en rappelant qu’il est né à Nazareth le 6 novembre 1948. Soit l’année de la Nakba, “la catastrophe” en arabe, quand 700 000 Palestinien.nes ont été déplacé.es de force au moment de la création de l’État d’Israël. Le père de Bella n’avait même pas un an quand il a été contraint à l’exil. Un temps réfugiée dans un camp en Syrie, la famille Hadid part ensuite en Tunisie et en Grèce, avant de s’envoler pour les États-Unis. Un héritage qu’a toujours revendiqué Bella Hadid malgré les pressions et les opportunités perdues. En août 2022, elle expliquait dans le podcast Rep que de nombreuses marques avaient cessé leur collaboration avec elle en raison de son engagement.
Mais après l’attaque du Hamas le 7 octobre dernier et l’embrasement qui a suivi, Bella Hadid s’est tue. Quinze jours de silence pour lesquels elle s’est excusée dans un post déchirant (en slide 2).
Depuis, la star ne cesse de poster des appels à un cessez-le-feu mais aussi, comme le note la journaliste Fatma Torkhani, créatrice d’Arabia Vox, de célébrer la culture et les habitant.es de Palestine, en leur rendant un visage alors que de nombreux médias mainstream tente de les déshumaniser.
Une prise de parole qui a entraîné une vague de menaces et de harcèlement contre la jeune femme de 27 ans, mais qui lui vaut aussi le soutien de la diaspora palestinienne, ainsi que des défenseur.ses des droits des civil.es palestien.nes à l’autodétermination, à la sécurité et à la paix.
Cette guerre étant aussi celle de l’information, le discours de Bella lui échappe forcément et les fake news fleurissent. Cette semaine, un site jordanien a ainsi affirmé que Bella Hadid avait été remplacée par le modèle israélien May Tager en tant qu’égérie Dior, alors qu’elle travaille pour la marque depuis un an. D’autres font mine d’ignorer sa condamnation claire des exactions du Hamas et son soutien aux proches des victimes en Israël. Mais pas de quoi ébranler Bella, à qui personne ne peut dire “Sois belle et tais-toi”.
Jalapeñews est une newsletter de Coline Clavaud-Mégevand. DA Chiara Vecchiarelli.
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